L’Échange des princesses, une adaptation sans relief

Marc Dugain porte à l’écran L’Echange des princesses de Chantal Thomas. En quête de sobriété, il livre une mise en scène intimiste, hélas trop pauvre en émotion.

C’est une parenthèse de l’Histoire. En 1721, le régent Philippe d’Orléans propose à Philippe V d’Espagne un mariage entre Louis XV, âgé de onze ans, et la très jeune Infante, Maria Anna Victoria, quatre ans. Il offre aussi sa fille, Mademoiselle de Montpensier, en noces au jeune prince des Asturies. Cette tentative d’alliance aurait le mérite de faciliter la réconciliation entre les deux royaumes, mais on ne se joue pas ainsi du cœur des hommes.

Marc Dugain s’empare, pour sa deuxième adaptation historique, de cet épisode méconnu dévoilé dans L’échange des princesses, le roman historique publié en 2013 par Chantal Thomas aux éditions du Seuil. Pendant 1h40, l’écrivain et cinéaste dépeint un modèle monarchique déclinant, à bout de souffle, parfois à la limite du grotesque.

Les fastes de Versailles, souvent reconstitués avec gourmandise par les productions à grands moyens, ne sont que suggérés. Le réalisateur prend le parti d’un film intimiste, mettant rarement en scène plus de trois personnages. Propulsé dans les appartements privés ou les lits des souverains – lieux de tous les enjeux politiques -, le spectateur se retrouve complice des indiscrétions et manigances des courtisans. La proximité avec ces illustres aristocrates reste cependant superficielle, le réalisateur échouant à en faire partager la dimension émotionnelle.

Les dialogues peu fournis empêchent les personnages de se déployer dans leur complexité affective, et privent le film de profondeur. Mlle De Montpensier, interprétée par Anamaria Vartolomei, est une enfant rebelle, sans éducation, qui refuse en bloc le mariage qu’on lui impose. Tout au long du film, la future – et furtive – reine est cantonnée au rôle de l’effrontée, sans que jamais le récit ne lui donne la possibilité de sortir de ce registre.

L’Échange des Princesses convainc en revanche par son esthétique léchée. La photographie est superbe et les lumières sont soignées. La scène d’exposition, éclairée seulement par une bougie et la faible lueur de l’aube, évoque le clair-obscur des toiles de George de La Tour. Ce somptueux préambule augurait d’un film plus délicat et plus touchant.

Raphaëlle Chabran
L’Échange des princesses, film français de Marc Dugain, 1h40. Sortie prévue le 27 décembre.