Dans la jeune femme à l’aiguille, le Suédois Magnus von Horn entend présenter un « conte pour adultes ». À Copenhague, en 1918, une jeune ouvrière tente de survivre à la succession de malheurs et d’horreurs qui l’accablent.
Copenhague, 1918. Karoline, jeune ouvrière, est sans nouvelles de son mari. Elle est expulsée de son appartement et contrainte de se réfugier dans un taudis. La couturière croit arriver au bout de ses souffrances quand elle tombe enceinte de son riche patron et qu’il accepte de l’épouser. Mais la réalité rattrape vite Karoline. Elle se retrouve seule, enceinte, et sans travail. C’est alors qu’elle rencontre Dagmar, qui lui assure pouvoir régler ce problème. Karoline se persuade qu’elle est sa sauveuse, et s’y accroche autant qu’elle le peut.
Film en noir et blanc, ambiance très noire
« La jeune femme à l’aiguille » est un film glaçant, entièrement en noir et blanc. L’attention est donnée à chaque détail : les murs décharnés, le bourdonnement incessant des mouches, le sifflement du vent dans l’appartement décrépi. L’image ne fait de cadeau à aucun personnage. La musique non plus. Même lorsque Karoline ose imaginer une vie meilleure, la bande son ne participe pas à l’illusion. Et dans les moments de tension, elle paraît presque cogner l’écran. L’oppression est perceptible. Interdiction est faite au spectateur de se détendre une seconde.
« Ce monde est horrible. On doit se convaincre du contraire, tu comprends ? », souffle Dagmar à Karoline. Dans ce que le réalisateur décrit comme un « conte pour adultes », tous les personnages souffrent, ou presque. Seuls deux hommes, pourtant responsables d’une partie des événements, échappent au déchaînement de cruauté.
Trop d’horreurs tuent l’horreur
Le réalisateur aurait-il éprouvé un plaisir sadique à imposer à ses personnages féminins autant de malheurs ? Les scènes hyper violentes ne manquent pas, mais certaines, plus centrées sur le corps de Karoline que sur les calamités qui l’entourent, menacent de faire tomber le film dans une sorte d’érotisation de la douleur féminine.
Les désastres se succèdent, trop vite et trop nombreux. À multiplier les horreurs qui s’abattent sur Karoline, Magnus von Horn peine à les explorer jusqu’au bout : certaines n’ont l’air que d’être des traumatismes supplémentaires sur une liste trop grande, et en perdent de leur impact.
Pourtant, la quête de Karoline auprès de Dagmar est haletante. Le malaise ne s’arrête pas de grandir. Le spectateur ose à peine mettre bout à bout les indices, de peur de ce qu’il pourrait deviner. Pire encore, Magnus von Horn s’inspire de faits réels. Une énigme aussi affreuse que captivante, mais noyée dans la surenchère.
Camille Ribot
La Jeune Femme à l’aiguille, un film danois de Magnus von Horn, sortira le 26 février 2025.