Le documentaire Fellini, confidences retrouvées dresse implicitement le portrait de l’Italie à travers celui du réalisateur de La Strada et La Dolce Vita.
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Dans le nouveau biopic Fellini, confidences retrouvées, le documentariste Jean-Christophe Rosé exhume des extraits de son interview fleuve avec le maestro du cinéma italien. Réalisés en 1981 à Cinecittà et chez Federico Fellini, ces entretiens avaient été en grande partie perdus. En s’appuyant sur ces quelques bribes restantes et la retranscription de l’entièreté des réponses, Jean-Christophe Rosé reconstitue chronologiquement la vie de ce cinéaste à la renommée internationale. Un biopic moderne et richement documenté.
Sur ces fragments d’entretien, Federico Fellini apparaît en fin de carrière, cheveux grisonnants et lourdes lunettes vintage. Le “dandy de Rimini” est le seul qui s’exprime face caméra tout au long du documentaire (exception faite de son ami et acteur Alberto Sordi). Des images d’archives issues des coulisses de ses tournages et d’événements historiques illustrent ses propos et ceux de Jean-Christophe Rosé.
Un deuxième portrait en parallèle
Un autre portrait se dessine en parallèle : celui de l’Italie. Le fascisme, la seconde guerre mondiale, le pouvoir de l’Eglise, mai 68, l’avènement de Silvio Berlusconi… Les événements les plus marquants de l’histoire de la Botte sont narrés dans ce film.
Federico Fellini parle d’une voix calme, mais ses mains sont agitées. Il ne s’agace que lorsqu’il évoque la télévision. Pour le cinéaste, elle impose un rythme trop rapide. La possibilité de zapper entre les chaînes entraîne selon lui “une extrême superficialité basée seulement sur une sensation épidermique”. La télévision a créé “un spectateur qui bavarde au cinéma, incapable de suivre une description et de savourer une atmosphère. Il ne sait plus non plus se concentrer sur une image longue et silencieuse.” Qu’aurait pensé ce contemplatif de la frénésie des réseaux sociaux ?
Rêves et dépression
Jean-Christophe Rosé s’attarde aussi sur la pression du succès et les épisodes de dépression qui ont jalonné la vie de Fellini. Sa thérapie psychanalytique est longuement évoquée ainsi que l’influence de ses rêves et de ses cauchemars sur ses œuvres : “Je cherche en moi-même des choses inventées ou qui me sont vraiment arrivées. D’ailleurs, je ne vois guère de différence entre les deux.”
Le documentariste pose un regard tendre sur ce monstre sacré du cinéma, avec admiration mais sans dévotion. Les caprices et les extravagances de cette star ne sont pas pas éludés, comme la construction onéreuse des décors avant même la signature des contrats de production.
A la fin de sa vie, Fellini, cheminant d’échec en échec, est en conflit avec ses producteurs et le public se désintéresse de son art. L’une de ses dernières confidences est une leçon de son expérience : “Il est bon de rencontrer des obstacles, des oppositions, des frictions, d’être obligé de lutter pour ce que l’on fait, de se convaincre avec entêtement du bien fondé de son projet. C’est un passage obligé qui sert le film.”
Lucile Coppalle