L’histoire est écrite par les vainqueurs, ou du moins, les plus forts. L’armée française le sait bien. Ses anciennes colonies aussi.
La France a toujours eu du mal avec son propre récit, vieille coutume centraliste et royaliste où contester l’état revient à douter des cieux. Tant d’erreurs pourtant dans notre manière de raconter nos événements. Longtemps, d’ailleurs, ce terme a opportunément enfoui les derniers pas du colonisateur en Algérie. Voile maladroit jeté sur des plaies béantes. La réconciliation, pas tant avec l’ennemi qu’avec nous-mêmes, viendra, lentement.
Il en va de même pour les soldats africains venus donner leur chair aux canons de 14-18. On les a appelés tirailleurs sénégalais, pour simplifier. Ils venaient de plusieurs territoires, appartenaient à différentes ethnies, parlaient d’autres langues. Raflés dans les villages, ils ont servi la France dans l’absurdité de la guerre. Leur mémoire a longtemps attendu un geste de salut.
Failles mémorielles après et mensonges assumés avant. Qu’a-t-on promis aux colonisés en échange de leur sang dans les tranchées ? Rente et reconnaissance ? Qu’a-t-on vendu aux appelés en Algérie pour traverser la Méditerranée ? Aventure et patriotisme ?
À la force du travail des historiens et du passage du temps, la mémoire s’ouvre. Les fantômes ressurgissent et nous confrontent, contemporains d’une époque où l’armée française n’a pas quitté le continent africain. Elle tire tout de même certains enseignements, heureusement. En 2013, la France a ainsi attendu la demande formelle du gouvernement malien pour venir soutenir ses forces militaires. Le président d’alors, François Hollande, acclamé à Bamako, s’attache d’ailleurs à marteler cette démarche.
Les tirailleurs sénégalais de la Première Guerre mondiale, une mémoire balbutiante
- Avec « Tirailleurs », Mathieu Vadepied filme une puissante histoire entre un père et son fils et rétablit, un peu, la mémoire des tirailleurs sénégalais. Une critique de Roman Bouquet Littre.
- « Tirailleurs », une fiction pour se remémorer l’essentiel, par Arnaud Connen de Kerillis et Mohammed Fawzi.
La France et la Guerre d’Algérie, l’impossible acceptation ?
- « C’était la Guerre d’Algérie », un documentaire en cinq épisodes pour enfin mettre des mots sur la guerre. Une critique de Salomé Chergui.
Avec l’opération Barkhane, l’armée toujours en Afrique
- Après une opération Serval efficace, le fiasco de Barkhane, par Arnaud Connen de Kerillis.
- Pour Jean Crépu, réalisateur de « Guerre au Mali, coulisses d’un engrenage », la faillite de l’État malien explique beaucoup l’enlisement de la situation. Une interview réalisée par Louis Faurent et Paul Lonceint Spinelli.
Louis Faurent
Crédit photo : Avec « Tirailleurs », la mémoire de ces soldats colonisés est un peu rétablie. © Marie-Clémence David, 2022 – Unité – Korokoro – Gaumont – France 3 Cinéma – Mille Soleils – Sypossible Africa.