Un constat alarmant : 90% des contenus vidéos comportent des violences physiques et sexuelles à l’encontre des femmes, et impactent largement les consommateurs mineurs.
La consommation de vidéos à caractère pornographique n’est pas sans conséquences, pour le spectateur mineur. L’étude du Haut conseil à l’égalité entre les hommes et les femmes (HCE), donne des chiffres alarmants : en 2023, 90% des vidéos pornographiques contiennent des violences physiques et sexuelles à l’encontre des femmes.
Alors que nous savons que la consommation de ces contenus est massivement masculine (75%), avec 51% de visiteurs âgés de 12 ans, la question des conséquences psychiques se place au centre des préoccupations. D’après Alain Héril, psychanalyste et sexothérapeute interrogé dans la revue L’école des parents, la période charnière se situe aux alentours de 12 ans : en-deçà de cet âge, la consommation devient «dangereuse».
«Avant 12 ans, l’enfant n’a pas les outils pour recevoir des images pornographiques. (…) Ces images arrivent sur un terrain vierge, en quelque sorte, et ne peuvent que faire effraction dans son psychisme, de manière violente. C’est ce que j’appelle un viol scopique », explique le psychanalyste. «Alors que l’enfant n’est pas encore actif sexuellement, dans la réalité, on peut craindre que ces images lui tiennent lieu de modèles, pour élaborer ses représentations et forger son éducation sexuelle», poursuit le spécialiste.
La consommation pornographique infantile dépasse celle des adultes La consommation mensuelle des mineurs rejoint ou dépasse celle des hommes majeurs. Ainsi, 51% des garçons de 12 ans, 59% des garçons de 14 ans, et 65% des garçons de 16 ans se rendent sur un site pornographique chaque mois, contre 55% des hommes majeurs. |
Le risque d’une banalisation de la violence
La corrélation entre les violences faites aux femmes au sein des contenus pornographiques, et les représentations forgées par des enfants, se fait naturellement. Selon l’étude de HCE, 42% des garçons «pensent que les filles apprécient les agressions sexuelles». La banalisation de la violence faite aux femmes provient, en partie, de cet imaginaire de violence.
D’après la directrice générale de l’association e-Enfance, Justine Atlan, qui a été interrogée par la même revue : «Le plus souvent, c’est la femme qui est «objetisée», l’homme, lui, est pris dans des injonctions de performance. Il est évidemment ennuyeux qu’un enfant construise ses premières représentations de la sexualité sur ce modèle».
Cependant, l’exposition des mineurs reste souvent involontaire ou subie, en raison de la large accessibilité de l’industrie pornographique sur internet, soutenue par des stratégies de marketing présentes sur les réseaux sociaux. C’est pourquoi la part des mineurs consommateurs de ces produits a fortement augmenté, de 2017 à 2022, passant de 17% à 28%, avec un âge moyen de 10 ans.
Sahra Kadi-Pasquer, Paul Florequin, Olivia Frisetti